Au mois de février 1964, les Beatles provoquent une sorte de tsunami pop lors de leurs trois passages au Ed Sullivan Show devant plus de soixante-treize millions de téléspectateurs américains médusés. Les jeunes filles pubères à grosses lunettes qui composent le public se font littéralement pipi dans la culotte en poussant des salves de cris hystériques devant nos quatre garçons dans le vent incapables de se départir de leur légendaire sourire. Pour les témoins de cet événement, c’est une véritable épiphanie, et le mot n’est pas usurpé puisque Lennon, grand philosophe de comptoir devant l’éternel déclarera sans ambages, deux ans plus tard, que les Beatles sont plus populaires que Jésus Christ ! Les Rolling Stones ne tarderont pas quelques mois plus tard à débarquer sur le nouveau continent formant ainsi la deuxième phalange de la british invasion venant ringardiser le roi Elvis et ses sujets apathiques. Les groupes locaux, laminés par ce blitzkrieg à la sauce chutney, devront attendre la résurrection de Paul Revere et de ses Raiders appuyés de la première horde de garage bands, avant de bouter lors d’une ultime midnight ride les redoutables britons hors du territoire ravagé. Les biographes de Bobb Trimble affirment que le natif de Malborough, Massachussets (1958) aurait vécu une sorte d’épiphanie à rebours puisqu’il écrivait sur les notes de pochette de son premier album édité en 1980 : « Chers John, Paul, George et Ringo, je suis un bon garçon et je bosse vraiment dur, s’il vous plait est ce que je pourrais devenir un jour le 5ème Beatle ? » Apparemment, il n’avait pas entendu causer de Pete Best, Brian Epstein ou George Martin (au choix) et ne semblait pas informé que les Beatles étaient séparés depuis bientôt dix ans. De toute manière, Bobb avançait au rythme d’une horloge passablement déréglée. Depuis qu’il avait mis de côté suffisamment d’argent en travaillant dans le magasin de cycles de son paternel, il allait pouvoir réaliser son grand dessein : enregistrer un album de ses compositions qui lui permettrait d’égaler voire surpasser les grands maîtres qui avaient marqué son adolescence (Beatles, Pink Floyd, Bowie et autres Monkees). Alors que ses congénères et néanmoins camarades s’échinaient sur la micro scène punk locale de Worcester surnommée la "Wormtown", dont les Prefab Messiah resteront les plus éminents représentants, l’ami Bobb ne retenant de son temps que le précepte du "Do it yourself" s’appliquait à coucher sur la cire les huit diamants qui orneraient son premier album : Iron Curtain Innocence. Les ballades psyché pop un brin torturées qui composent ce premier opus semblent puisées au tréfonds de la psyché de Trimble. Le timbre de sa voix de falsetto haut perchée transporte l’auditeur attentif dans un univers onirique et inquiétant. On se rapproche plus de Syd Barett que des "Fab four" pour le coup. Bidouillant un peu le son de sa voix et de sa guitare (à l’instar des Beatles du double blanc) à l’aide d’un micro synthétiseur, il ajoute du spoken word, des rires d’épouvante, des effets sonores qui confèrent à l’ensemble de son œuvre une atmosphère flottante et inhospitalière. Si j’osais une comparaison hasardeuse autant qu’illusoire, cet album pourrait être la bande son d’un remake de Vol au-dessus d’un nid d'un nid de coucous, réalisé par Tim Burton. Selon l’interview que Bobb donna au magazine It’s Psychedelic Baby, le 24 juin 2012 : Glass menagerie fantasies serait sa version d’un livre bien réel, mais qu’il n’aurait jamais lu. A night at the asylum se passe de commentaires. When the ravens call est la suite qu’il a conçue pour le morceau de David Bowie : Space oddity. Killed by the hands of an unknown rockstar est une chanson country aux vilaines paroles sombres, dont la pochette du disque (mitraillette Al Capone / Gibson SG et tronche de Balavoine) illustre le propos. One mile from heaven est juste un petit chef d’œuvre qui vous donne la chair de poule ! Trimble fera presser cinq-cent exemplaires de son album et tentera de les distribuer par ses propres moyens, en vain. En 1982 après deux nouvelles années de labeur dans le magasin de cycles, il réalisera un deuxième disque : Harvest of dreams du même tonneau que le précédent, dans lequel il fait participer une bande de gamins du quartier de Northborough âgés de douze ans à peine. Les parents n’ayant pas trop apprécié, les séances d’éveil musical menées par ce dérangé mettront un terme à cette expérience créative. Rincé par ce nouvel échec, Bobb jettera l’éponge (Joke !) et les bandes de son ultime effort (1983) avec le Cripple dog band dans une benne à ordure. C’était sans compter sur la persévérance de vaillants diggers collectionneurs qui exhumeront les deux premiers joyaux finalement réédités par le label Secretly Canadian en 2008. Dommage que ce franc-tireur romantique dont le travail était sans doute trop en avance ou trop en retard pour son époque n’ai pas croisé la route d’un John Peel pour lancer sa carrière…
LE DUKE [Vous prendrez bien le temps d'un petit commentaire !]
01 - Glass Menagerie Fantasies
02 - Night At The Asylum
03 - When The Raven Calls
04 - Your Little Pawn
05 - One Mile From Heaven [Shot Version]
06 - Killed By The Hand Of An Unknown Rockstar
07 - Through My Eyes (Hopeless As Hell : D.O.A)
08 - One Mile From Heaven [Long Version]
09 - Glass Menagerie Fantasies [Demo Version]
10 - Night At The Asylum [Demo Version]
11 - When The Raven Calls [Demo Version]
MP3 (320 kbps) + artwork
COOL 103
09 - Glass Menagerie Fantasies [Demo Version]
10 - Night At The Asylum [Demo Version]
11 - When The Raven Calls [Demo Version]
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