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mardi 8 octobre 2019

THE REPLACEMENTS ~ Dead Man’s Pop [Boxset] [2019]



« It’s too late to turn back here we go. »

Faire le con c’est ma spécialité. Les Replacements c’est mon groupe, euh voyons voir je retourne une carte, qu’est-ce qu’elle dit : fétiche. Voilà, aujourd’hui c’est mon groupe fétiche et demain mon groupe favori et après-demain, ah j’arrête là. Par contre faire le con en écrivant sur les Replacements c’est comme essayer de courir à côté d’Usain Bolt pour l’interviewer. Tout ça pour vous dire que cette chronique sera sérieuse ou ne sera pas. Et que ce n’est vraiment pas ma spécialité. Va me falloir travailler les fondamentaux, Hey-ho, let’s go : Il était une fois…

Il était une fois un disque que les « véritables » fans du groupe qui l’avait sorti vilipendaient.

Ce disque je crois bien que même son principal auteur le reniait, principalement pour une histoire de production, de mix, de chais pas quoi encore mais des trucs qui me dépassent, même et surtout la quantité d’alcool ingurgitée durant son enregistrement. Maintenant faut que je fasse gaffe à pas vous livrer d’anecdotes, même si les doigts me brûlent, mais les fondamentaux bordel, les fondamentaux !

Et moi je l’adore Don’t tell a soul. Juste après Pleased to meet me c’est mon album préféré des Mats. Un jour je vous expliquerai pourquoi on diminue les Replacements en Mats, pas aujourd’hui. Et, croix d’bois croix d’fer, je voulais vous en parler depuis des lustres de cet album pestiféré, en une sorte d’expiation cathartique mâtinée d’une volonté de réhabilitation dont avec vous pour témoins l’échec était assuré ! Et là, pas plus tard que y a deux jours, ou trois, avec ces conneries j’ai perdu toute notion de temps ou sens commun, nous sort ce pavé, 4CD-1LP autour de l’objet du délit, délicatement nommé Dead man’s pop. J’interviewe Jimmy, qui court moins vite qu’Usain Bolt, voilà ce qu’il me dit : « McCartney l'a fait avec Let it be, alors pourquoi pas les Replacements? » Je vous laisse méditer ça un petit moment. Ça y est, vous l’avez ? OK, on reprend.

Les Mats étaient du genre à faire voler en éclats certitudes et convenances, même et surtout après avoir établi les leurs, et ça a marché avec les miennes.

La production d’abord. En général j’en ai rien à branler de qui produit quoi (tant que c’est pas Eno) et oui branler est le mot adapté quand on parle de Branleurs. Les Mats eux, passés leurs deux premiers brûlots, ont laissé leurs enregistrements brindezingues successivement entre les mains de tenez-vous bien Peter Jesperson (faudra qu’un jour je vous parle de lui, vraiment), Tommy Erdelyi et Jim Dickinson (pour le Plus Grand Disque de l’Histoire fallait bien ça). Au sujet de ce dernier, un aparté qui n’a rien à voir (comme tout bon aparté) : les enfants Dickinson traînaient bien sûr au milieu de tout ce beau monde, Chilton inclus, durant l’enregistrement de Pleased to meet me, et Westerberg a chopé Luther, 15 ans, pour le faire jouer sur un des morceaux… mais on a dit pas d’anecdotes, tout ça pour dire que les frangins Cody et Luther D viennent de sortir leur Xème disque avec NMAS ces jours-ci et il est positivement génial. Fin de l’aparté.

Donc après cette brochette de producteurs plutôt classe les Mats se dégottent un certain Matt Wallace, les sessions se passent comme si c’était les Replacements qui enregistraient mais en mieux, c’est à dire en pire. Le résultat ne sonne pas assez grand public pour les financiers (j’ai pas leurs noms) qui voulaient faire d’eux des vedettes et ils refilent le bébé à un certain Chris Lord-Alge qui pisse dans la bouteille déjà pleine et du coup ça marche, pour les « ventes », les radios FM et les passages télé en tout cas. Pour Paulo et ses fans hardcore pas du tout. Moi j’m’en fous toujours de qui produit quoi et le disque je l’adore ça je vous l’ai déjà dit. Y a juste un truc qui me gêne un peu et je l’ai pas compris tout de suite. Comme c’est le plus vendu et donc le plus « connu » à l’extérieur d’un certain cercle tout un tas de mecs qui revendiquaient l’influence des Mats ne les connaissaient que sous cet angle-là. Du coup ben ils faisaient de la merde et m’avaient enduit d’erreur. Pas de noms. Mais y a que les Mats pour faire de Don’t tell a soul un chef d’œuvre (ça y est, je m’emballe).

Et voilà l’idée de base à la parution de ce coffret : ressortir les enregistrements originaux Matt Wallace ! Là, même moi je fais la différence, j’ai fini cul par-dessus tête à la première écoute. Faire voler en éclats des certitudes que je vous dis, la première en ce qui me concerne.

Deuxième certitude : si les bonus sont des bonus d’une le nom est mal trouvé et de deux s’ils ne sont pas sur les albums originaux c’est pour une bonne raison. Là on en a donc un CD entier. Que dire par exemple des morceaux enregistrés avec un Thomas Alan Waits aussi voire plus inébrié que Paulo et ses acolytes (c’est fait exprès) ? Qu’ils sont dispensables ? Qu’aucun d’entre eux ne tient debout, que c’est peut-être un détail pour vous mais que pour moi ça veut dire beaucoup ? Notre planète, ma planète, irait encore plus mal sans l’existence des deux loustics ci-mentionnés et ça me suffit. Ce truc-là est juste une tranche de vie à laquelle j’aurais même pas rêvé participer, mon foie et mon cerveau n’auraient pas supporté. Sans compter que Date to church tient debout, elle. Mais des bonus y en a d’autres, je vais pas vous en faire la liste je suis déjà assez long comme ça par contre je vous incite à aller voir de quoi il retourne. Je vous en donne deux pour commencer, essayez les l’un après l’autre : Portland et Wake-Up. Ils démontrent à eux seuls le spectre qu’est capable de couvrir le talent de songwriter de Westerberg... Portland est née à la suite d’une tournée mémorable durant laquelle le concert de… pas d’anecdote ! Portland, avec ses paroles et son histoire, c’est l’archétype d’une chanson des Mats dont d’aucuns disent que si elle est bonne elle te fait rire et pleurer en même temps. Portland est sublime. Wake-up ? Ben essaye de faire un truc aussi simple, aussi bête avec un tel résultat (rappel : tu n’es pas les Ramones). C’est de l’orfèvrerie, je n’en démordrai pas. Et y en a un paquet d’autres, qu’il s’agisse d’alternates, d’inédits ou de reprises, qui rendent ce CD2 juste indispensable. Quittons-nous là-dessus.

Héééé non j’déconne, attendez la troisième certitude : un album live, euh ouais… Comment, double ? Aaah… des Replacements ? Euh, mais j’ai pas vraiment besoin de ça moi …

Blam, CD 3 et 4, Milwaukee le 2 juin 1989 ! On tient là le deuxième meilleur (encore !) enregistrement scénique connu des lascars. Peut-être même premier ex-aequo avec devinez quoi, celui que Jimmy posta ici-même y a deux ans. La principale différence entre ces deux concerts, outre les morceaux, celle d’ailleurs qui initia en partie les réticences envers Don’t tell a soul, c’est l’absence de Bob Stinson, viré quelque temps auparavant.

Pour faire court on peut l’évoquer comme le Brian Jones, en bien plus déjanté, des Mats. Déjanté, je vous l’écris pas au hasard : pour qualifier son remplacement (haha !) par Slim Dunlap un critique (j’ai pas son nom…) disait en gros que sur scène c’était toujours aussi risqué d’aller voir les Replacements mais qu’au moins la bagnole ne risquait plus de perdre ses roues lancée sur l’autoroute. C’aurait été plus drôle s’il s’était appelé Dunlop. Sinon 1989 c’est l’année de la fameuse tournée avec Tom Petty, je vous en ai déjà parlé et… pas d’anecdote, bon sang fais un effort ! Le groupe était au point comme jamais, comme en atteste ce passage TV pour les International Rock Awards, le nom fait rêver, ouais je sais c’est une anecdote mais là elle aide à la compréhension du truc alors ferme-là s’il te plaît. Ils sont introduits comme ça : « we apologize, here they are, The Replacements ! », Paulo débute comme ça : « what the hell are we doing here ? » J’avoue que cela peut paraître un peu convenu mais l’ironie réside ailleurs. D’une le morceau joué c’est Talent Show, est-il possible de faire plus ironique dans une émission où ils côtoient Bowie, Lou Reed et autres face à un public assis à table qui n’attend absolument rien d’eux ? Je vous laisse le soin d’en vérifier les paroles. Paroles dont on leur avait demandé de modifier une ligne pour « passer à la télé à une heure de grande audience » : « We’re feeling good from the pills we took. » Ils avaient accepté, bien sûr, et l’avaient chanté normalement, bien sûr. Mais le réalisateur qui devait moyennement leur faire confiance a coupé le son juste à ce moment-là. Il a juste pas fait gaffe que Paulo l’a rajoutée deux fois en fin de morceau où elle n’a rien à faire. Au milieu de 2-3 conneries qu’il se glisse à lui-même … Imaginez les lascars en totale liberté et en pleine forme face à un public complice et vous avez The Complete Inconcerated Live. A placer tout en haut sur l’étagère des Grand Lives. Mais à écouter après les deux CD précédents : Dead Man’s Pop, 3h40 de pleurs et de rires simultanés, est là pour sauver le monde. Et le monde, ingrat qu’il est, ne le sait même pas.

Comme vous êtes mes potes j’ai essayé de vous prévenir.

Et de rester sérieux.

Everett W. GILLES [Vous prendrez bien le temps d’un petit commentaire, sans déconner c’est les Mats !]

 






CD1 & LP : Don’t Tell A Soul Redux [Matt Wallace Mix]
 01 - Talent Show 
 02 - I'll Be You
 03 - We'll Inherit The Earth [Matt Wallace Mix]
 04 - Achin' To Be [Matt Wallace Mix] 
 05 - Darlin' One [Matt Wallace Mix] 
 06 - Back To Back [Matt Wallace Mix]
 07 - I Won't [Matt Wallace Mix]
 08 - Asking Me Lies [Matt Wallace Mix]
 09 - They're Blind [Matt Wallace Mix]
 10 - Anywhere's Better Than Here [Matt Wallace Mix]
 11 - Rock 'N' Roll Ghost [Matt Wallace Mix]
CD2 : We Know The Night : Rare & Unreleased
CD3 : The Complete Inconcerated Live, Part 1
CD4 : The Complete Inconcerated Live, Part 2