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vendredi 18 janvier 2019

KOFFI ROGER N'GUESSAN, ELANNI & DJAÏ ~ Légère Amertume (Une Histoire Du Thé) [2019]



Comme Jimmy me donne son accord pour parler d’autre chose que de musique (oui, je sais, c’est honteux), j’m’en vais vous causer quelques lignes de Bande Dessinée et, pour une fois, je vais tenter d’être clair et de ne pas digresser.
Enfin, quand je dis que ça ne va pas parler musique, il faut tout de même savoir que l’autre scénariste et moi, nous nous sommes rencontrés sur fond de Manset et que j’écris tout le temps en musique. De fait, il y a bien une bande originale à cet album, mais il me serait bien impossible de vous en faire ne serait-ce qu’une compilation tellement tout s’est enchainé.
A l’origine, nous avons eu une idée scénariste que nous trouvons originale, cette idée s’est baladée de contexte en contexte jusqu’à tomber en Afrique. Ce projet est devenu La Case Blanche, une histoire hard-boiled post première guerre mondiale avec des personnages franchement patibulaires et racistes. Nous avons eu la chance (après plus de dix ans d’écriture et de recherche, le temps de perdre des cheveux mais pas l’espoir en somme) d’être accepté par un éditeur et de trouver un dessinateur africain (je le précise, parce que finalement quand vous vous lancez sur la piste de propos racistes et qu’un artistique africain vous dit : « c’est génial », vous vous dîtes que vous avez visé juste – ou pas loin). Seulement voilà, le dessinateur doit honorer différents contrats. De là, nous voilà participants aux « Contes de Morne Plage », un projet qui nous permet de faire la connaissance de Koffi Roger N’Guessan, un dessinateur au style vif qui enchaine les projets. Il nous demande si on a quelques chose sous le coude et… nous en avons des tas (d’ailleurs, si vous êtes dessinatrice ou dessinateur, n’hésitez pas à faire coucou). Sauf, sauf qu’aucun ne correspond vraiment au style de Koffi. Comme nous sommes deux amateurs de thé, nous voilà lancés dans un scénario autour du thé.
Cette histoire fut vite pensée, vite construite, vite écrite et la mise en case fut également assez rapide (je dirais six mois d’écriture intense et un peu moins d’un an de relecture, réécriture et ajustement au fil des dessins de Koffi). Enfin, tout a coulé de source (c’est mieux de l’eau de source pour le thé de qualité) pour cette histoire. Nous nous sommes basés sur l’une des innombrables versions de l’adage « sucré comme l’amour, amer comme… » pour diviser l’histoire en trois parties, nous avons relié chacune de ces parties à un âge de la vie de notre héroïne, nous avons imaginé un événement formateur ou dramatique en lien avec le thé pour chacune de ces parties pour ensuite venir greffer à tout ça des « histoires dans l’histoire ». Un procédé d’enchâssement, de récits gigognes que l’on apprécie particulièrement et qui nous permettait ici de donner des informations sur la culture du thé ou sur son importance dans l’Histoire sans tomber dans l’essai pontifiant. Pour ne rien vous cacher le plus difficile fut de parvenir à créer des éléments dramatiques courts en très peu de pages et si nous nous sommes séparés le travail pour varier les tonalités des récits, nous nous sommes concentrés sur les transitions entre les récits (ça revient à choisir l’ordre des morceaux sur un album, si vous avez peaufiner deux belles rythmiques, deux ambiances mais que vous les faites s’enchainer trop brutalement ou trop doucement vous n’arriverez pas à la synergie nécessaire… s’pas facile).


Finalement, ça parle d’une petite fille qui reçoit une théière des mains de sa mère (et l’histoire/légende qui accompagne l’objet) au milieu du siècle dernier en Afrique du nord, d’une jeune femme engagée comme reporter de guerre qui apprend dans la douleur que tous les conflits se ressemblent quand il s’agit de faire du profit et d’une femme âgée (pleine de ressources) qui s’échappe d’une visite guidée pour découvrir les secrets du thé chinois. Enfin, vous l’aurez compris ça parle surtout de transmission.
Voilà, la B.D. (comme le secteur littéraire) souffre d’un trop plein de sorties et qu’en prime nous n’avons pas énormément de com’ ou de marketing, on se doute qu’on ne va pas finir millionnaires sur ce coup (d’ailleurs pour celles et ceux qui se poseraient la question, nous avons un pourcentage sur les ventes, pourcentage que nous avons décidé de laisser presque intégralement au dessinateur. Et globalement vivre de la B.D. de nos jours n’est pas chose évidente) mais on se dit que l’album pourrait trouver son public.
YGGDRALIVRE [Vous prendrez bien le temps d'un petit commentaire !]