Toni Barber, le
premier bassiste des Buzzcocks, haïssait les sixties. Il comprit
d’emblée que les seventies seraient jouissives et colorées
lorsque Arsenal réalisa le doublé coupe et championnat lors depour la
première année de la décade. Nottingham Forest, sorti de la
deuxième division grâce à son génial manager Brian Clough, clôturera
la décennie par une sorte d’apothéose en remportant par deux
fois la coupe d’Europe des clubs champions en 1979 et 1980 avant de
replonger lentement dans les abysses du Championship dont elle n’a jamais plus resurgi. Musicalement
parlant, pour le supporter des gunners, les planètes
ont commencé à s’aligner en 1972, lorsqu’il vit Marc Bolan à
l’émission Top of the pops qui amorçait l’explosion du glam
rock. Susie Q, Slade, "Double G" (Garry Glitter pour
les sourds et malentendants), T.Rex, Sweet… allaient déferler sur
la planète teen en alignant les singles comme s’il
en pleuvait. L’opportuniste
Bowie qui comme Bolan (malgré sa tentative de folk psyché peu
concluante), était resté en rade sur le quai des sixties, préparait
sur le pas de tir glam la fusée à étages Ziggy 1 pilotée par
capitaine Rono direction Mars et sa constellation d’étoiles
scintillantes. Mott the Hooople qui besognait à la cave se
voyait offrir par le même Bowie l’opportunité de briller enfin
sur le devant de la scène avec le morceau : All the young
dudes. Le film
prémonitoire de Kubrick : Orange mécanique de 1971
marquera les esprits par son esthétique Glam et sa mise en scène
d’une ultra violence gratuite et sadique exercée par une bande de
boot boys dégénérés (les droogs). Phantom of the paradise du jeune et brillant Brian De Palma fera aussi dans
le style par sa parabole faustienne à la sauce Glitter. Outre atlantique, Alice Cooper, les New York Dolls et Iggy and the Stooges (réactivés par
l’inévitable Bowie) et même ce bon vieux Lou Reed (Transformer)
ravivaient par leurs outrances un (hard) rock moribond laissant
espérer un renouveau rock'n'rollien qui ne se concrétisera pas
malgré les avatars sans suite de la scène punk rock. Bientôt des
groupes aussi classieux et parfaits que Roxy Music, Be Bop Deluxe ou Sparks allaient émerger de ce fumier de paillettes. Après une
honnête carrière punk, post punk etc. qui s’essouffle vers
1982, Barber doit faire un constat amer : les expérimentations
dangereuses de la new wave, le mariage avec les
synthés, l’exclusion des guitares et du power chord,
l’intellectualisation bidon et artificielle de la musique, ont
conduit le punk rock dans des miasmes bien plus terrifiants que le prog rock qu’il prétendait combattre. Jamais plus le rock ne se
préoccupera de son cœur de cible prioritaire : les teenagers. Le premier
octobre 1982, sortait au Japon le premier compact disc numérique :
une réédition de l’album 52th street de Billie
Joel , sonnant le glas du vinyle et de son format roi, le 45 tours. La messe était
dite. Flanqué de son
acolyte, le collectionneur Phil King, Barber commence à récolter et
archiver tous les singles qui peuvent s’apparenter à la madeleine proustienne de son adolescence glam. "Descends
donc voir au sous-sol, j’ai une ou deux caisses de cette daube 70’s
que tu recherches, si tu pouvais m’en débarrasser cela m’éviterai
de faire un voyage à la déchetterie - OK, pas
de souci, approche la camionnette, Phil, on va charger !"
Donc, voici
regroupé sur 3 CD de 60 titres savoureusement agencés le fruit
d’une partie de leur travail d’anthropologie rock'n'rollienne à
l’usage des jeunes générations ignares. (Les deux compères ont
déjà produits plusieurs compilations de glam rock.) Sur le CD 1, Rock
off, on n'est pas encore tout à fait dans le glam, c’est plutôt du proto
punk, de la power pop graisseuse, ou du bovver rock à la mode Jesse Hector (Hammersmith Gorillas, Crushed Butler… )
ou ce que vous voudrez. L’esprit du bovver rock résumé par Jesse Hector ce serait : "Huh t’a pas vu machin aujourd’hui ? - Hein quoi ? qu’est ce ça peut te foutre ! fais pas chier connard !!" Tout une
philosophie malheureusement révolue de nos jours. Parmi mes
morceaux préférés, le stoogien : Hey sweetie de
Ray Owens Moon, le rock cockney prolo de Third wold war conduit par le chauffeur routier Terry Stamp qui commettra l’album
Fatsticks avec Ollie Hallsal à la gratte (dispo sur Utube
uniquement !) ; Be your man par les horribles
Brats from NYC, formés par l’ancien guitariste des Dolls, Rick
Rivets ; Le choo choo boogie de James Hogg : Lovely lady
rock ; Teenage love affair de Iron
virgin ; Hard road de Stevie Right ancien
chanteur des Easybeats (Friday on my mind !) avec le jeune
Malcom Young (AC-DC) à la rythmique... Sur le CD 2 : Tubthumpers hellraisers, on passe au glam bubblegum
de bas étage qu’on adore, enfin vous voyez le genre gros malabar
crasseux collés sous la semelle de mes platform boots. La tenue de base
du stomper, pantalon pattes d’éléphant avec
revers de 10 cm de large porté au-dessous du genou, chaussettes de
cricket, bovver boots ou baskets montantes à lacets style boxing,
polo à rayures colorées ou maillot de foot col pelle à tarte,
coupe de cheveux court devant long derrière à la Chris Waddle voire
pour les blonds décolorés une espèce de coupe au bol longue avec
la frange remontée en haut du front. Le truc à filer une sévère
crise d’urticaire à tous les vieux mods du quartier s’il en
restait encore. Sur cette deuxième galette,
je conseille : Bye bye bad days de Hector qui a réalisé d’autres bons singles ; le Saturday night de Bilbo Biggins d’Edimbourg à terroriser Elton John et son : Saturday’s night allright for fighting tout juste
bon pour la cour de récréation ; Zéphir de Baby grande de Camberra Australie avec ses chorus en Français ; Cut loose de Stud Leather... Les grands absents
de cette compile sont Jook, les plus doués sans nul doute (écoutez
un peu cette merveille de morceau glam pop : Crazy Kids sur le tube !) et le teddy boy chaines et cuir recyclé glam
Alvin Stardust. Sur le CD 3 : Elegance and décadence, on aborde une version du
glam rock plus soft et raffinée, musicalement plus aboutie, on se
rapproche plus de Ziggy et Roxy comme dirait Ramon Pipin, qui
pratiquait le twist and glam avec son groupe Au Bonheur Des Dames. A noter : Night
creatures de l’excellent Be Bop Deluxe menés par le
guitariste Billy Nelson ; Ultra star de Rococo
qui fricotait avec le prog rock tout comme Be Bop Deluxe ; Waiting des regrettés Doctors Of Madness avec leur
violon fou ; I live in style in maida vale de
Jesse Hector avec Helter Skelter ; Pastiche blue, le slow de l’été 76 à Brighton par James Arthur Edwards... Pour conclure, je
vous laisse méditer deux citations de Brian Clough, un philosophe de
la trempe de Jesse Hector qui pourraient s’appliquer aux
commentaires que vous aller faire sur ce billet. Sur la nécessité
de faire participer les joueurs aux prises de décision : "On a
discuté pendant vingt minutes et on a convenu que j’avais raison." "Si Dieu
avait voulu qu’on joue dans les nuages, il aurait mis de la pelouse
la haut…"
THE DUKE [Vous prendrez bien le temps d'un petit commentaire !]
P.S. : pour les footeux littéraires, par le génial auteur de
polars anglais David Peace : 44 jours, c’est le
temps exact qu’a passé Brian Clough à Leeds United avant de se
faire saquer par les dirigeants. Red or dead !, un
livre définitif sur le foot anglais à Liverpool par le même
auteur.
CD1 :
01 - Ray Owen's Moon - Hey Sweety
02 - Third World War - Working Class Man
03 - Iggy & The Stooges - I Got A Right
04 - Milk 'n' Cookies - Wok 'n' Roll
05 - Method - Hold On Tight
06 - Brats - Be A Man
07 - Change - Lazy London Lady
08 - Gio Macari - Lookin' For Love
09 - Slowload - Big Boobs Boogie
10 - James Hogg - Lovely Lady Rock
11 - Iron Virgin - Teenage Love Affair
12 - A Supernaut - I Like It Both Ways
13 - Fancy - Brother John
14 - Rats - Don't Let Go
15 - Cole Younger - She's Not My Lover
16 - Sweeney Todd Featuring Guy Adams - Roxy Roller
17 - Taste - Boys Will Be Boys
18 - The Hustler - Get Outta My 'Ouse
19 - Ning An - Machine
20 - Stevie Wright - Hard Road
CD2 :
01 - Harpo - My Teenage Queen
02 - Hector - Bye Bye Bad Days
03 - Bilbo Baggins - Saturday Night
04 - Hello - Games Up
05 - Frenzy - Poser
06 - Simon Turner - Sex Appeal
07 - The Jets - Yeah!
08 - Lemming - Lucifera
09 - Mott The Hoople - Whizz Kid
10 - Angel - Little Boy Blue
11 - Baby Grande - Zephyr
12 - Hot Rod - I Want You (All Night Long)
13 - Redhead - Lookin' For You
14 - Stud Leather - Cut Loose
15 - Biggles - Gimme Gimme Some Lovin'
16 - Mint - Dog Eats Dog
17 - Tank - Fast Train
18 - One Hit Wonders - Hey Hey Jump Now
19 - Boneshaker - Sweetness
20 - U.K. Jones - Let Me Tell Ya
CD3 :
01 - Brett Smiley - Abstracting Billy
02 - John Howard - Who's Coming To Dinner
03 - Metro - Criminal World
04 - Roy Allison - White Stockings
05 - Paul St John - Spaceship Lover
06 - Rococo - Ultrastar
07 - Woody Woodmansey's U-Boat - Star Machine
08 - Be-Bop Deluxe - Night Creatures
09 - Clive Kennedy - New York City Pretty
10 - John Henry - I Won't Dance
11 - Steve Elgin - Don't Leave Your Lover Lying Around (Dear)
12 - Alastair Riddell - Wonder Ones
13 - Helter Skelter - I Live In Style In Maida Vale [Demo Version]
14 - Greg Robbins - Virginia Creeper
15 - Brian Wells - Paper Party
16 - Doctors Of Madness - Waiting
17 - Sleaze - Showbiz Kid
18 - The Spiders From Mars - White Man, Black Man
19 - James Arthur Edwards - Pastiche Blue
20 - Buster - Daybreak
MP3 (320 kbps) + artwork
Merci,beau cadeau
RépondreSupprimerHa oui, après un beau papier UNCUT qu'il m'a fallu décortiquer (mon anglais, c'est pas encore 100% ça) voilà un chouette guide d'écoute. Après on peut toujours débattre, se battre, pour défendre des étapes musicales qui me tiennent tout autant à coeur: Prog (que j'adore) et l'arrivée des synthé 80's et son retour du 45t et des tubes pop plutôt que rock. Des synthés qui ont fait bien plus de mal au funk ceci dit en passant. Merci
RépondreSupprimerIl faudrait cesser de résumer les années 80 aux groupes à synthés (lesquels peuvent offrir des choses formidables, quand ils sont tenus par des gens talentueux). Le problème de cette époque, c'est qu'on a tout fourré sous l'étiquette new wave, des petits frères des punks jusqu'aux garçons coiffeurs. Personnellement, je considère que c'est l'une des meilleures périodes du rock, même si c'est durant cette décennie que les pires atrocités furent commises...
SupprimerLes synthés ont fait beaucoup de mal au Prog Rock surtout.
SupprimerIls auraient mieux fait de laisser ces joujoux au groupes teutons qui savaient s'en servir eux.
Très peu de chance d'en trouver dans la compilation quoique Eno et Roxy ...
Duke
Une compile pantagruélique que je viens à peine de commencer. Mais jusque là, c'est super. Merci The Duke.
RépondreSupprimerLes 3 CD sont bien agencés, différents et variés. Ça passe très bien dans l'autoradio.
SupprimerBon écoute
Abrazo fuerte
Duke
Incroyablement varié et énormément de choses que je ne connaissais pas , Encore merci
RépondreSupprimerEffectivement c'est à la fois très hétéroclite et cohérent à l'image du Glam rock qui a concerné des artistes aussi différents que SLADE, KIM FOWLEY, QUEEN et 10CC...
RépondreSupprimerComme il s'agit d'un travail de collectionneurs ils ont regroupé à la manière de Lenny Kaye ou Greg Shaw des groupes qui n'ont sorti qu'un ou deux singles.Dommage que l'on ne puisse pas télécharger le livret car il est très intéressant. Devinette: le jeune Brian Adams âgé de 15 ans chante sur l'un des titres ?
TV Smith le chanteur des Adverts officiait pour le groupe SLEAZE avant de passer au Punk sans trop se vanter de sa jeunesse GLAM.
Duke
Je l'ignorais: dans le dernier Rock & Folk, j'ai appris que Sid Vicious se teignait les cheveux en rouge et se vernissait les ongles!
SupprimerIl parait aussi qu'il a inventé le Pogo la seule danse qui demande une maîtrise totale de ses nerfs un truc de Bouddhistes en somme. j'espère que l'histoire saura rendre compte à ce grand musicien pour sa contribution.
RépondreSupprimerDuduche
Bel objet, suffisamment foutraque et bien vendu pour qu'on s'y plonge. Je l'avais vu passer mais j'avais hésité, là c'est bon tu m'as décidé.
RépondreSupprimerÉlégance et décadence, en voilà un joli sous-titre.
Par contre tu as beau régulièrement tourner autour du pot et essayer de nous noyer avec des références footballistiques ou autres la vérité c'est que t'as fait une grosse sieste de 76 à 82 et tu veux nous convaincre que pendant que tu dormais il ne s'est rien passé. Escroc !
Au contraire j'étais sur tous les fronts de 76 à 82 !
RépondreSupprimerC'est plutôt en 85 que j'ai commencé à pioncer ce qui m'a valu de rater le "non avènement" d'un groupe de branleurs de Minneapolis qui prétendait concourir dans un championnat indépendant "indie" ou je ne sais quoi.Tu parles, on a vu ou ça les a mené de vouloir braver les règles du syndicat du Rock sans l'autorisation du parrain du New Jersey !
The dude
The Bon Jovi Incident, ha ...
SupprimerPas de championnat pour les 'Mats, ils avaient pas de concurrents dans la connerie !
Ils reprenaient Slade, c'est te dire.
Moi qui n'en suis encore qu'à écouter le coffret Tom Petty (un peu en boucle, il faut l'avouer).... et v'là un autre coffret (sachant que j'ai récupéré aussi celui de Dylan sur Bloods on the tracks et celui de The Sound et que je voudrais bien me replonger dans les disques de Talk Talk).
RépondreSupprimerTu n'as pas besoin de trop te concentrer pour écouter cette compilation, les 3 CD sont différents et très variés ils représentent un peu la genèse du punk. Par contre je te déconseille d'écouter Talk Talk après ou alors alterne avec le coffret de Dylan et de son dernier magnifique album avant...
RépondreSupprimerDuke
many thanks...
RépondreSupprimerYou 're welcome dude!
RépondreSupprimerEnjoy and Rock on...
Duke
Pas courant Metro et Doctor of Madness sur la meme compile mais pour ces derniers "Mainline" est un titre plus fort (ok sur un cd de 20 titre 15:44 minutes ça ne le fait pas)
RépondreSupprimerAu niveau du choix des morceaux je trouve que ça "matche bien". Bien entendu les deux groupes méritent l'écoute des albums complets et surtout Metro qui est moins connu et à découvrir.
RépondreSupprimerBonne écoute.
Duke
Merci pour ce partage.
RépondreSupprimerLe troisième CD est en 128K. Merci qaund même!
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